Laboralys n°40 | Fenêtre de pierre



L'atelier de Pierre Boreux est en parfaite harmonie avec le matériau qu'il travaille. Une ancienne étable, plus haute que large, fermement arrimée à une prairie en pente douce, et lestée par de lourdes pierres de taile, comme pour l'empêcher de s'évader vers les nuages, comme pour s'agripper au réel et parler de ce qui est, avec un soupçon de figuratif et une dose savante d'abstraction poétique.

Pierre Boreux est muni de son maillet et d'un burin pour donner la touche finale à une sculpture sur pierre qu'il a intitulée « C'est l'leu ki foume si pupe » [*]. Pour comprendre ce titre, il suffit de tourner la tête et de regarder à travers la seule fenêtre de l'atelier. On voit au loin, de l'autre côté de la vallée de Lustin, un profil végétal qui n'est pas sans rappeler ce que la sculpture évoque avec poésie. Et au milieu de cette fenêtre de pierre, une fumerole se laisse entrevoir, qui apparaît également au travers de la fenêtre de verre. C'est cette fumerole qui s'échappe de la pipe du loup lorsqu'après une forte pluie ou un orage, les différences de températures conduisent à un phénomène météorologique singulier.

Ancrée dans le réel, la sculpture de Pierre Boreux n'en est pas moins une allégorie de la réalité. Il suffit d'ouvrir les yeux sur les choses simples qui entourent l'atelier, de retourner vers la nature, de prendre le temps de poser son regard sur ces choses que l'on ne regarde plus, pour découvrir une source intarissable de poésie. C'est ce que fait Pierre Boreux en la matérialisant au sein de la pierre. Cette pierre qui soutient les prairies, forêts et fumeroles, observant depuis des temps immémoriaux le ballet des saisons. Et comme par une action alchimique, la sculpture permet la rencontre entre nature et matière qui la compose, comme un modèle qui se répète à l'intérieur de lui-même. La matière prend vie et parle d'elle-même à travers le regard et les gestes de l'artisan.

[*] « C'est le loup qui fume sa pipe »

L'atelier de Pierre Boreux


Reportage publié le 7 novembre 2015.



La Province de Namur a financé ce reportage Ce reportage a été rendu possible grâce au soutien de la Province de Namur et de l'Office des Métiers d'Art.