Laboralys n°15 | L'atelier de la tisserande Claudine Frisque



Partons à la découverte d'un savoir bel et bien en voie de disparition: le tissage manuel est en effet devenu rare voire introuvable de nos jours. Et pourtant, au fond d'une ruelle paisible de Malonne, une tisserande confectionne des vêtements sur mesure et sur métier traditionnel. Avec une expertise affûtée, Claudine Frisque sélectionne et tisse la laine, allant même jusqu'à récolter la matière première de ses propres chèvres. Rien n'est donc laissé au hasard pour parvenir à un produit fini alliant qualité et passion du travail bien fait.

Tout commence par la récolte de la toison. Deux fois par an, le mari de Claudine - André Jeanmart - extrait en un tour de main la masse laineuse de leur cheptel. Les chèvres se voient ainsi dénudées en quelques minutes et de un à quelques kilos de laine par bête sont ainsi récoltés. Celle-ci sera ensuite nettoyée, cardée et filée pour en faire des pelotes. Cette opération est assurée par une filature à Namur - que nous aurons très certainement le plaisir de visiter prochainement. Et de comprendre que le monde du tissage traditionnel est un club très restreint où les artisans se connaissent tous et collaborent activement.



Claudine Frisque possède trois métiers à tisser. L'entrelacement de câbles et de fils est à ce point complexe qu'il en donnerait presque le tournis. On comprend aisément que l'art de tisser manuellement n'est pas inné. Il exige une concentration redoutable et une maitrise à toute épreuve pour parvenir aux formes géométriques complexes et aux mélanges de couleurs que requiert la confection d'un manteau ou d'une robe. Lorsque Claudine exerce son art, dans une posture analogue à celle de l'organiste, son instrument fait naître devant elle une partition faite de points et de virgules laineuses. Exclamations, colorations, tout est prétexte à la création.

Mais derrière le miroir, au-delà de l'artisanat, dans un espace doux comme la laine se love un corpuscule de résistance contre le tout-venant, contre la grande-série, pour rappeler que les savoirs ne sont pas perdus et que tout est encore possible.


Reportage publié le 24 mars 2012.